Je trépignai sur ma chaise ; que faisait-elle ? Elle n'était pas censé être en retard. Je soufflai un grand coup, avant de reprendre une gorgée d'eau, nerveuse. Ce n'était pas dans mes habitudes, d'être anxieuse. Je ne l’étais même jamais. J'étais Leo, la fille à qui on enviait sa confiance en elle, sa facilité à s'exprimer et son détachement. Mais à ce moment précis, j'étais tout l'inverse de la Leopoldine normale. Pourquoi stressai-je tant ? Ce n'était pas la première fois que j'en parlais. Et surtout, c'était ma sœur, ma protectrice, elle comprendrait, elle m'aiderait. Je fus soudain coupée net dans mes angoisse, apercevant Lysandre à la porte du café. Je me levai pour la serrer dans mes bras. « Salut ma belle. Qu'est ce que tu as de si important à me dire ? » Avais-je été si pressante dans mon sms, pour qu'elle me lâche ça comme ça ? Ou alors, c'était mon regard qui trahissait mon haut niveaux d'angoisse ? Hors de question de me défiler, pas maintenant. Je pris une grand respiration, avant de lancer : « Sandy, je suis gay. J'aime les femmes. » Je fermai les yeux, puis les rouvrit immédiatement, pour ne rien rater de sa réaction. Elle me fixait, les yeux ronds. J'espérai qu'elle ne parte pas en courant. Ou qu'elle n'aille pas avertir mes parents, ce qui serait encore pire. Notre famille était très catholique, et j'avais été élevé dans l'esprit que l'homosexualité était mal. J'avais très vite abandonné la religion, mais mes parents eux restaient campés sur leurs positions. Leur annoncer maintenant serait comme rompre définitivement toute relation avec eux. Après une poignée de seconde interminable, elle lâcha. « Waow. » Je fus soulagée par ce simple mot, qui signifiait à lui seul l'acceptation de cette nouvelle. Je la regardai, puis nous partîmes dans un fou rire comme nous n'en avions pas connu depuis longtemps. Je repris mon sérieux. « Quand est ce que tu compte l'annoncer aux parents ? » me demanda-t-elle, avec compassion. « Dans une ou deux ... dizaine d'années. Sérieusement Lysandre, comment tu crois qu’ils vont prendre ça. Évidemment, mal. Rappelle toi quand maman changeait de trottoir quand elle voyait deux type de tenir par la main. Je t'en supplie, ne leur dit rien. Je te le dis parce que j'ai confiance en toi. S'il te plait. » Elle me regarda avec ses yeux de chiot, puis sourit. « Je te promet. Pour le moment. Il faudra leur annoncer. » « Je sais. » « Alors raconte moi, comment ça fait ! » « Putain, Sandy ! »

[...]

Je l'aperçut au bout de la rue, et fit immédiatement demi-tour, ignorant ses appels. Elle était morte à mes yeux, je ne voulais avoir à faire à elle. Je pressai le pas, mais les claquements rythmés de ses talons m'avertirent qu'elle me rattrapait.« LEO ! » Je sentais les larmes sur mes joues, mais pour l'instant, je me concentrai sur le pavé pour ne pas me prendre les pieds dedans. Sentant ses pas se rapprocher, je me mis à courir. « Leopoldine ! » Je pensai à rien d'autre qu'à m'échapper. Je martelai le sol, courant un peu plus vite à chaque fois qu'elle criait mon nom. J'étouffai plusieurs sanglots, qui venaient interrompre le souffle régulier de ma course. « LEO ! Arrête toi, je t'en pris, je vais t'expliquer. » A ces mots, mes jambes cessèrent de fonctionner. Je m'arrêtai brusquement, puis me retourna vers la jeune rousse qui se tenait là, courbée par l’essoufflement. « M'expliquer quoi ?! Pourquoi tu as balancé que j'étais lesbienne aux parents ? Ou bien, pourquoi à cause de toi, ils ont coupé tous les ponts avec moi ? » Ma voix était méconnaissable; essoufflée et entrecoupée de sanglots, elle avait pris quelque chose de dramatique, d’effrayant même. Mon allure ne devait rien arranger. « Explique moi, vas-y j’attends. » Elle pleurait elle aussi. De culpabilité peut-être, mais la cause exacte m'importait peut. Je voulais qu'elle disparaisse. « C'était pour t'aider. Tu aurais bien dû leur avouer un jour ! Trois ans, trois ans que tu leur cachaient. Je ne pouvais plus garder ça. » Elle s'agitait, ne sachant quoi dire. Après avoir marqué une pause, elle répéta. « Je voulais juste t'aider... » Je secouai la tête. Je puis la regarda dans les yeux. « Au revoir Sandy. Je ne veux plus jamais te revoir. » Je tournai lui le dos, et commença à avancer droit devant moi.